Depuis quelques semaines, un mot inconnu du grand public s’infiltre discrètement dans nos conversations : wangiri. D’apparence inoffensive, ce terme japonais cache en réalité une arnaque téléphonique redoutablement efficace. Et le plus inquiétant, c’est que vous êtes peut-être déjà tombé dans le piège… sans le savoir.
Une simple sonnerie, aucun message… et l’envie de rappeler. Voici comment cette escroquerie au numéro surtaxé vide les poches des victimes à leur insu. Explications et conseils pour ne pas vous faire avoir.
Sommaire :
Le « wangiri », une arnaque vieille comme le monde sous un nouveau nom
Derrière ce mot exotique se cache une technique bien connue des cyberescrocs : le bon vieux « ping call », remis au goût du jour sous le nom plus intrigant de wangiri, qui signifie en japonais « sonner et raccrocher ».
Le principe est d’une simplicité redoutable :
Un appel, une sonnerie… puis plus rien. Le numéro ne laisse aucun message. La victime, intriguée ou inquiète, rappelle. Et c’est là que l’arnaque opère : elle tombe sur un numéro surtaxé, parfois localisé à l’étranger, où un serveur vocal la maintient en ligne le plus longtemps possible.
Résultat : une facture salée pour la victime, et un joli pactole pour les arnaqueurs, qui touchent une commission sur chaque seconde passée au téléphone.
Une technique bien rodée et de plus en plus répandue
Si le mot « wangiri » ne vous dit rien, sa méthode, elle, est bien connue des plateformes de cybersécurité.
Les escrocs utilisent des robots d’appel pour composer des milliers de numéros à la chaîne, souvent à des horaires stratégiques :
- Tard le soir
- Très tôt le matin
- Ou en plein milieu de la journée, quand les gens sont moins disponibles
C’est à ces moments précis que les victimes sont le plus enclines à rappeler, persuadées d’avoir manqué un appel important.
Le piège fonctionne d’autant mieux que ces appels proviennent parfois de numéros à 10 chiffres classiques, difficiles à distinguer d’un numéro légitime. Fini le temps des appels suspects avec des indicatifs exotiques. Les arnaqueurs redoublent d’efforts pour masquer leurs intentions.
Ce que vous risquez si vous tombez dans le panneau
Selon Jean-Jacques Latour, expert en cybersécurité chez Cybermalveillance.gouv.fr, cette escroquerie peut coûter plusieurs dizaines d’euros par appel.
Pire encore : si vous suivez les instructions du serveur vocal (taper 1, patienter pour un conseiller, etc.), la durée de l’appel s’allonge… et votre facture explose.
Les fraudeurs achètent des numéros surtaxés auprès d’opérateurs légaux. Ils touchent ensuite une partie des frais générés. Le tout se fait en toute discrétion. En quelques minutes, vous pouvez perdre beaucoup d’argent, sans même vous en rendre compte.
Comment reconnaître une tentative de « wangiri » ?
Certains signes ne trompent pas. Voici les indices à surveiller pour éviter de tomber dans le piège :
- Un seul coup de sonnerie, sans rappel ni message
- Un appel provenant d’un numéro étranger ou inconnu
- Des horaires inhabituels (nuit, heures de travail)
- Aucun message vocal laissé, même après plusieurs tentatives
Si vous avez le moindre doute, ne rappelez jamais un numéro inconnu qui ne vous a laissé aucun message. Une personne ayant réellement besoin de vous contacter laissera un message clair ou rappellera plus tard.
Que faire pour se protéger efficacement ?
Même si l’arnaque repose sur un geste simple — rappeler — il existe plusieurs solutions pour s’en prémunir :
Installez une application de filtrage d’appels
Certains opérateurs (comme Orange, SFR, Bouygues) proposent des services anti-spam téléphonique intégrés à leurs forfaits ou via une application dédiée. Ces outils permettent d’identifier et de bloquer automatiquement les appels suspects.
Inscrivez-vous sur Bloctel
Le service Bloctel, mis en place par l’État français, permet d’inscrire votre numéro sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique. Ce filtre n’est pas infaillible, mais il réduit considérablement le nombre d’appels indésirables.
Signalez les numéros frauduleux au 33700
En cas d’appel suspect, envoyez le numéro par SMS au 33700. Ce numéro gratuit recueille les signalements pour lutter contre les arnaques téléphoniques et les spams. Vous pouvez également signaler les SMS frauduleux en transférant le message au même numéro.
Une vigilance indispensable dans un monde hyperconnecté
À l’heure où nos téléphones sont devenus des prolongements de nous-mêmes, il est essentiel d’apprendre à identifier les tentatives d’escroquerie. Le wangiri ne fait pas dans la sophistication, mais il exploite un réflexe humain simple : rappeler un appel manqué.
Et c’est justement cette simplicité qui le rend dangereusement efficace.
Restez sur vos gardes. Ne rappelez pas n’importe qui. Et surtout, prévenez vos proches, en particulier les personnes âgées ou moins à l’aise avec les nouvelles technologies. Ce sont souvent les premières cibles.